Au fil du passage, pour qu'il s'immobilise, pour une fin de semaine en amoureux encore transis,
l'ancien prodige des prestigieuses maisons parisiennes (Taillevent, Tour d'argent)
initie une friande histoire d'amour et d'adolescence avec la nature.
Celui qui ne rumine jamais le passé explosa toutes les étapes. (…)
Toute une famille de chefs pousse derrière lui, aujourd'hui, comme par émulation.
La vogue moléculaire révolue, Eric GUERIN précise le décorum de l'assiette.
Foin des épices froides, retour aux dessins des cartes, ricochet sur la région,
renouveau de la cuisine française avec une inspiration de déplacements non pas à
travers le monde mais à travers son monde. Les visions d'un paysage. (…)
Né dans la ville rose en 1970, celui qui fut premier chef de partie chez Alain REIX à 23 ans,
partagea ses amours enfantines entre grand-mères et arrières grand-mères monumentales centenaires (…)
Pour ses 18 ans, Eric GUERIN requiert une invitation à dîner au JULES VERNE, son futur employeur.
L'Afrique l'influence déjà au cœur. (…)Toutes les fins de semaines, il accourt en Sologne, en Irlande, en Normandie.
Toutes les terres du monde inventent des terrains de chasse. La perdrix, le faisan, les cocottes.
Avec une bande d'amis épris de voyages et de liberté, il habite une case au rythme de la levée du jour et de la tombée de la nuit. (…)
L'école hôtelière le taraudait : « le désir de faire plaisir ». Aujourd'hui, l'envol s'éclaircit.
Il reçoit des artistes, expose de l'art, monte deux ou trois expositions par an. (…)
Dans cette lignée où l'art traverse toute la généalogie, le père, haut fournisseur français de boutons,
créateur de ses propres collections, joue également un rôle prépondérant. Sculpteur, en retraite,
il nous invite encore à comprendre l'inscription de l'art dans la vie réelle chez les GUERIN. (…)
«
Je cuisine mon époque ». Celui qui passa chez
Michel GRAUX, son «
père spirituel dans le métier »,
à Vernon, au restaurant «
Les Fleurs », (…) imagine «
des aventures du goût », «
des univers d'atmosphères ».
La cuisine, si fragile, si mouvante, si évanescente. Du printemps des sensations de lumière perçante
à l'hiver des ambiances humides, les jus, réduits ou plus longs, changent, du concentré au gras en
passant par la chaleur des acidités. A carte évolutive, salle aimante.
Eric GUERIN sautille de crèmes
invisibles en produits relais qui balancent des signaux d'émotions à chaque reprise, des sauts de puce
excitée, des électrons fougueux qui s'entrecroisent d'un point à un autre. Comme dans une improvisation de
jazz, un rythme où nous sidère l'effrayante disposition des joueurs à partir très loin dans les tempi pour tous revenir,
retomber à l'acmé. «
Tous les peuples de l'île veulent fuir et s'attachent à leur terre ». (…)
Ces circonstances essentielles sublimées dans la proximité du goûteur passent l'histoire en revue
dans un remue-méninge digne d'une ultime et parfois violente provocation. En cette occurrence de palais,
seul l'effet importe. «
Un restaurant est un état d'esprit ». Promesse ou ivresse, humilité ou unicité,
«
chaque personne ne fait que manger, là réside la difficulté. Respect de soi, respect de l'autre,
respect de ce que l'on fait aux autres ». (…)
Révélé par le goût, ce gamin introverti qui ne soliloquait qu'avec ses chiens, s'émeut maintenant
de la force qu'il transmet à « ses jeunes » quand il leur signifie la clef du paradis. Demain,
son spectre s'élargira encore au diapason de ses humeurs d'humour, de ses moments fugaces arrachés
au désastre obscur.
Eric GUERIN ne prise rien tant que la variabilité des contrastes,
une géographie mouvante du frisson.
Benoît DEBEAUQUESNE dirige la communication notamment sur internet.
Nicolas GUIET, 27 ans, Maître international de la Mâche 2008, second de cuisine implacable au sens rugbystique,
exécute délicatement la leçon du maestro.
Marine Crété, directrice de salle, fine observatrice du moindre geste
de ses clients, découvre même les gauchers contrariés.
Laetitia Marquer, réceptionniste de charme, accueille humainement.
(…) Un sommelier iconoclaste et pointu ;
Cyril Carré, achèvera le bal. Affirmons le haut et clair.
« L'injustice renforce l'innocence »
(François Simon).